La ville de Bamako est confrontée à un phénomène qui rend la mobilité difficile et presque impossible sur certaines artères de la capitale. Il s’agit de l’occupation de devantures des routes par les vendeurs et les artisans. Ils y étalent leurs produits ou installent leurs kiosques. Nous nous sommes intéressés au sujet et avons rencontré différents acteurs : des vendeurs aux autorités via les usagers de routes.
La croissance de la population engendre un autre défi, celui qui s’impose aux autorités de la capitale malienne. C’est de libérer les alentours des routes. Bamako jadis surnommée la coquette de l’Afrique est aujourd’hui méconnaissable du fait du désordre qui règne sur les trottoirs de la ville. Des installations anarchiques des kiosques, des garages d’auto, des ateliers de soudures… En 2016, en préparant le sommet Afrique France, les autorités de l’époque avaient initié une vaste campagne de déguerpissement dans la ville en vue de libérer les trottoirs. Cette opération avait polémique, n’a pas été apprécié par tous.
Les occupants reconnaissent l’illégalité de leur acte. Ils disent le faire par contrainte afin de pouvoir subvenir aux besoins de leurs familles. Yaya Coulibaly, âgé d’une trentaine d’années est vendeur de chaussures, il les étale devant une route principale pour attirer des clients. « Il n’est pas facile d’avoir un magasin à soi, la caution est très élevée. Nous sommes obligés de faire ainsi, mais ce n’est pas facile. Nous sommes à la chaleur et exposés à toute sorte de danger. », nous confie-t-il. À l’instar de Yaya, sur le pont Fadh, Gaoussou Coulibaly tient un stand de fruit sous un grand parapluie, « un chef de famille ne peut rester les bras croisés, il est obligé de se débrouiller. On nous dit tout le temps que ce n’est pas un lieu de vente, ils ont raison, mais que faire. », reconnait-il.
Ces genres d’activités extraréglementaires ne sont pas sans conséquences, elles perturbent la circulation. C’est le cas par exemple du boulevard du peuple qui traverse le grand marché de Bamako, il est entièrement occupé par les vendeurs d’objets divers. C’est la même situation qui prévaut actuellement sur la RN9, c’est un embouteillage monstre qui paralyse les automobilistes, même les piétons ont du mal à se frayer un chemin. Un viaduc a été construit afin de palier cela, mais au niveau du marché de Yirimadio le phénomène persiste. Les usagers de la route nous parlent de leur calvaire et des risques que ces vendeurs s’exposent. « Tous les bouchons sur les routes c’est à cause d’eux. Certains vendeurs pensent que s’ils n’étalaient pas leurs articles sur la route, ils ne vont pas trouver de clients. Or ce n’est pas le cas, même sur son lit on trouve ce qui nous n’est destiné. », soutient Issa Coulibaly usager de la route. Youssouf Diakité, chauffeur de son état, invite les occupants à respecter les législations. « Je demande aux vendeurs de rester derrière les caniveaux, cela est bénéfique pour nous tous, car le jour où la voiture va échapper au contrôle du chauffeur, cela peut causer un drame ».
Certains citoyens indexent les autorités, selon eux, elles ne jouent pas pleinement son rôle. D’autres accusent les autorités communales d’encourager le phénomène en prélevant des taxes avec les occupants illicites. « C’est la mairie qui ne joue pas son rôle. Les agents de la mairie prennent la taxe avec ces gens-là. », affirme Aminata Diakité, une ménagère.
Dans le souci de toucher le problème du fond, nous avons saisi la mairie du district afin qu’elle nous donne des précisions, car dans les différentes interventions le rôle de la mairie revient à plusieurs reprises. Ces sollicitations sont restées sans réponses. Nous avons fini par obtenir un entretien avec le 3ème adjoint au maire de la commune V du district de Bamako, Adama Konaté.
Selon lui, ces différentes occupations des alentours de routes par les vendeurs sont illicites sans cadre légal. « Aucun occupant ne vous fournira une autorisation de la mairie. Ce sont des occupations illicites. », affirme-t-il. Il ajoute que depuis la tutelle du gouvernorat, des décisions ont été prises pour interdire l’occupation du domaine public. Contrairement à ce que pensent les citoyens, selon l’élu communal, la mairie n’a pas croisé les bras face au phénomène, c’est l’une de leurs préoccupations. « Nous avons la prérogative de libérer la voie publique. Dès que nous constatons qu’il y a eu une quelconque avancée sur la voie publique, nous dépêchons nos agents pour aller libérer la route. Cela occasionne souvent à la saisine des marchandises ».
Sur les accusations portant la taxation des occupants illicites, le 3ème adjoint au maire de la commune 5 reconnait le fait. Selon lui, il n’est pas interdit de les taxer. « Il n’est pas interdit de les taxer, car ils exercent des activités commerciales. C’est ce qu’on appelle la taxe de jouissance. », nous explique-t-il.
La vie en société exige le respect de certains principes et certaines règles, nul n’est censé ignorer la loi. Toute activité doit se faire dans le respect des législations en vigueur. Face à l’ampleur que prend ce phénomène, les autorités devraient envisager des mesures drastiques afin de mettre de l’ordre sur nos routes.
La Rédaction : Horontv.ml