Le Burkina Faso vient de connaitre, lundi 24 janvier 2022, son 8ème Coup d’État depuis son indépendance, dépassant ainsi le Nigeria avec sept putschs, un record sur le continent.
Après les années utopiques de la démocratisation, assistons-nous, à un désenchantement de ce modèle de gouvernance en Afrique de l’Ouest ? Qu’est-ce qui expliquent ces prises du pouvoir par les militaires ? Le temps des coups d’État n’est donc pas révolu en Afrique. Après le Mali, la Guinée Conakry, le Tchad et le Soudan, le Burkina-Faso vient d’être le théâtre d’une prise du pouvoir par des militaires. Il est difficile de faire une analyse générale de ces accaparements du pouvoir en floraison sur le continent, car chaque cas se diffère de l’autre.
Ainsi, il faut tenir aussi compte du contexte dans lequel intervient chacun d’eux. Si le contexte soudanais se tend vers une suite du printemps arabe, le cas du Tchad en est une violation de la constitution de ce pays qui prévoit que c’est le président du parlement qui assure l’intérim en cas de vacances du pouvoir. L’auto-proclamation du fils du Marechal Idriss Déby Itno à sa succession est en effet, un coup de forces. Le cas du Mali et celui du Faso ont un dénominateur commun notamment l’insécurité qui gangrenait. Celui de la Guinée les rejoint par la grogne sociale et la mauvaise gouvernance. Incontestablement en 2012, ce sont l’invasion du terrorisme et la rébellion touareg qui ont précipité la chute du régime du président Amadou Toumani Touré. Des militaires en colère face l’inefficacité des réponses contre les groupes armés se sont emparés du pouvoir à Bamako. Le même scénario s’est produit avec le président IBK sous lequel la situation sécuritaire du pays s’est dégradée. Depuis 2016, le Burkina-Faso connait des recrudescences d’attaques terroristes notamment dans sa partie frontalière dite la zone de trois frontières avec le Mali et le Niger. Cette avancée des groupes armés a fait des milliers de morts, plus d’un million de personnes déplacées dans le pays, des écoles fermées. Des massacres répétés de civiles, mais aussi des militaires. L’une de ces attaques-là plus meurtrière en date de mi-novembre contre un détachement de gendarmerie à Inata dans le nord où au moins 53 personnes ont perdu la vie dont 43 gendarmes. En juin dernier, plus de 160 civils avaient été tués à Solhan dans le Nord-Est du pays. Un véritable carnage qui a suscité colère et indignation partout au pays des hommes intègres. En effet, comme au Mali, dans un passé récent, les autorités Burkinabés avaient du mal à faire face à cette guerre contre les terroristes, à laquelle elles n’étaient sûrement pas préparées : manque de stratégie, faibles équipements militaires, rupture de rations alimentées entre autres.
« Un désenchantement »
Dans les années 60 – 70, les désillusions des indépendances africaines avaient embrasé le continent par une succession de coups d’État qui ont instauré des régimes militaires caractérisés par une gouvernance contestée. Au début des années 90, face à des violations des droits de l’homme, certaines puissances avaient conditionné leur aide et soutien économique à l’instauration du multipartisme dans les pays africains. Ces coups d’État à répétions présagent un désenchantement des démocraties en Afrique ou du moins du modèle occidental.
Proposée aux Africains comme une baguette magique qui mettrait fin à leurs problèmes, la démocratie souffre en Afrique. Un système de jeu très déséquilibré, la démocratie a ouvert la voie à un type de dirigeant sans grand scrupule qui torpille la constitution à sa guise, le cas de la Guinée en est un exemple, tripatouille les élections et instrumentales la justice.
Ces mœurs politiques peu honorables ont engendré une rupture entre les gouvernants et les peuples. Ces derniers se sentent trahis, car ne trouvant pas dans la démocratie la gouvernance vertueuse que l’on leur promettait. Les libertés qu’elle était censée garantir, ne les sont pas, les opposants politiques sont persécutés et emprisonnés. Le développement économique ne s’y trouvait non plus, ceux qui sont au pouvoir ont érigé en mode de gouvernance la corruption et la délinquance financière.
En effet, les jeunes Africains prennent de plus en plus conscience des intérêts stratégiques des puissances étrangères qui se jouent sur le continent. Ils dénoncent l’ambiguïté de certains partenariats extérieurs et font pression sur leurs dirigeants. Ils militent contre l’ingérence et le néocolonialisme. Les puissances extra régionales protègent certains dirigeants qui refusent de partir ou de quitter le pouvoir après les échéances électorales afin de sauvegarder leurs intérêts et n’hésitent pas à renverser certains pour instaurer la démocratie. Ce jeu d’intérêt, les jeunes africains l’ont compris, ils veulent la tourner en leur faveur.
La démocratie a des jours sombres devant elle tant que des dirigeants ne comprennent pas qu’elle ne se limite pas aux élections. Mais qu’elle exige aussi la transparence politique et la bonne gouvernance, gage de tout développement.
La rédaction horontv.ml