Après plus d’un an, le projet de nouvelle constitution soumis au corps électoral bascule le Mali dans une 4ème République. La Cour Constitutionnelle, composée de 9 sages, a rendu son arrêt, vendredi 21 juillet 2023, déclarant son adoption avec 96,91% pour le OUI contre 3,09% pour le NON, soit un taux de participation de 38,23%. Juste le lendemain de l’arrêt de la Cour, le texte a été promulgué par le président de la transition, colonel Assimi Goita, chef de l’État.
Le 10 juin 2022, nous apprenons au Journal Officiel, la création de la commission de Rédaction d’une nouvelle constitution. Chargée d’élaborer un avant-projet de loi portant Constitution de la République du Mali dans le cadre de la Refondation de l’État, la commission avait pour mission de faire appel à des personnes ressources en consultant l’ensemble des forces vives de la nation.
Un mois plus tard, le président de la transition, colonel Assimi Goita a procédé, le 12 juillet 2022, à l’installation des membres de la commission de Rédaction.
Le 27 septembre 2022, le délai de la mission de la commission de Rédaction a été prorogé jusqu’au 31 octobre 2022 par décret signé par le Président de la transition.
Le 30 septembre 2022, la Mission d’Observation des Élections au Mali (MODELE-MALI) a tenu un point de presse pour dénoncer le retard de la publication de l’avant-projet de nouvelle constitution. Le dispositif d’observations électorale a, de ce fait, recommandé la publication dans le meilleur délai de l’avant-projet de constitution et une large consultation autour de ce texte.
« L’opposition intègre la Commission »
Dirigée par le professeur, Fousseyni Samaké, la commission a procédé, le 11 octobre 2022, à la remise du rapport de fin de mission et de l’avant-projet de nouvelle constitution au président de la transition.
La teneur de l’avant-projet et la pertinence même d’une nouvelle constitution ont été remises en cause par un certain nombre de partis politiques et d’acteurs de la société civile. Parmi les points clés de la réforme, on retient le retrait au français de son statut de longue officielle. L’avant-projet doit aussi permettre aux Maliens de l’étranger de participer aux élections législatives.
Le 19 décembre 2022, une commission chargée de la finalisation du projet de nouvelle Constitution de la République du Mali a été créée. Selon le décret qui annonce cette information, la commission a pour mission d’examiner et d’amender, le cas échéant, l’avant-projet de Constitution élaboré par la Commission de rédaction, en vue de produire et de soumettre le document constitutionnel au président de la Transition.
Le 10 janvier 2023, les membres de l’Autorité Indépendante de Gestion des Élections, AIGE, ont été officiellement installés.
Le 27 janvier 2023, le président de la transition prend un nouveau décret nommant les membres de la commission chargée de la finalisation du projet de nouvelle constitution. Les opposants à l’organisation du référendum intègrent la commission. Parmi eux, l’ancien ministre, Amadou Koita et Amadou Aya, tous membres du cadre d’échanges des partis et regroupements politiques pour une transition réussie. Ce regroupement politique avait pourtant réaffirmé son opposition au projet.
« Retrait pur et simple du mot « laïcité »
Le 27 février 2023, a eu lieu, la cérémonie de la remise solennelle du projet de Constitution de la République du Mali dans la salle des banquets de Koulouba. Cet événement, placé sous la Haute Présidence du Chef de l’État, Colonel Assimi Goita, Président de la Transition, a enregistré la présence du Premier ministre, du ministre d’État, du Président du Conseil national de Transition, du ministre de la Refondation de l’État, chargé des Relations avec les Institutions, ainsi que des membres du Gouvernement. Le texte doit être remis en référendum le 19 mars.
Le 06 mars 2023, l’Appel du 20 février pour sauver le Mali a annoncé son intention de faire barrage à la tenue du référendum sur le nouveau projet de constitution.
Le 07 mars 2023, la Ligue Malienne des Imams et Érudits pour la Solidarité islamique a lancé un appel solennel à tous les musulmans patriotes à voter contre le projet de nouvelle constitution sous sa forme actuelle. Cet appel a été lancé au cours d’un point de presse. Pour rappel, la LIMAMA avait demandé le retrait pur et simple du mot « laïcité » sur toutes ses formes de l’avant-projet de Constitution.
Le 10 mars 2023, le gouvernement du Mali a fait un communiqué annonçant le report du scrutin référendaire prévu le 19 mars. Le colonel Abdoulaye Maiga, porte-parole du gouvernement, a annoncé par voie de communiqué que le référendum sur le nouveau projet de Constitution n’aura pas lieu comme prévu le 19 mars « un léger report » nécessite pour mieux organiser la consultation au niveau local et vulgariser le texte auprès du peuple.
« L’AIGE est prête »
Le 20 mars 2023, le président malien de la Transition a reçu au Palais de Koulouba, les forces vives de la nation, notamment les autorités et les légitimités traditionnelles, autour du projet de Constitution dont certaines dispositions suscitent une controverse. Le colonel Assimi Goita a rappelé à ses hôtes que le projet de Constitution, est « la concrétisation d’une volonté présente du peuple malien, exprimée lors des Assises Nationales de la Refondation (ANR) ».
Le 05 mai 2023, dans l’article 1er du décret portant convocation du collège électoral, il est stipulé que le collège électoral est convoqué le dimanche 18 juin 2023 sur toute l’étendue du territoire national et dans les missions diplomatiques et consulaires de la République du Mali, à l’effet de se prononcer sur le projet de Constitution, annexé au présent décret. Toutefois, les membres des Forces de Défense et de Sécurité votent, par anticipation, le dimanche 11 juin 2023, conformément à la loi électorale.
En réaction, plusieurs partis et organisations de la société civile ont dénoncé le projet estimant que les militaires au pouvoir ne sont pas légitimes pour organiser le référendum. Ils contestent également le fonds du texte qui garantit, selon eux, une impunité future à certaines personnalités et consacrent le renforcement du pouvoir du président.
Un autre aspect du projet fait l’objet de critiques. Dans une déclaration début mai, plusieurs associations culturelles, politiques et religieuses ont réclamé le retrait du mot laïcité du projet.
Par contre, d’autres partis et regroupements ont appelé leurs militants à voter en faveur de OUI lors du référendum constitutionnel.
Le 09 mai 2023, l’Autorité indépendante de Gestion des Élections, AIGE, rencontre pour la première fois la presse depuis son installation le 10 janvier de la même année. Au cours d’un point de presse, le président, Me Moustapha Cissé affirme que l’AIGE est prête pour l’organisation du scrutin avant de procéder le 15 mai 2023 à la nomination et l’installation des membres des coordinations de l’AIGE.
« Crient au loup »
Le même jour du 15 mai 2023, le premier ministre, Choguel Kokalla Maiga a procédé au lancement de la campagne de vulgarisation du projet de nouvelle constitution. Tenus au Centre International de Conférence de Bamako, CICB, les travaux ont réuni un grand nombre de représentants des médias. Pendant 15 jours, la partie gouvernementale et ses soutiens se sont lancés dans l’organisation des sessions d’appropriation visant à l’appréhension du contenu et de l’esprit du projet de constitution.
Pendant ce temps, des communiqués et réactions parachutaient de tous les côtés par les opposants afin d’appeler les électeurs à constituer un « front du non » afin de s’opposer à ce projet de nouvelle constitution.
Le 16 mai 2023, le parti Convergence pour le Développement du Mali (CODEM) a déclaré que selon toute vraisemblance, le pouvoir entend imposer à la nation une nouvelle constitution dont le processus est jugé inopportun, illégal, non transparent et non inclusif pour une frange significative des compatriotes.
Le 02 juin 2023, les campagnes électorales pour le référendum ont été ouvertes sur l’étendue du territoire. Pendant que le gouvernement emploie le vert et le sec pour la réussite de l’organisation de ce scrutin référendaire, les frondeurs font des pieds et des mains pour faire échouer le projet, les populations quant à elles crient au loup.
De l’ouverture de la campagne référendaire jusqu’à la clôture, les électeurs sont envahis par des messages de campagne à travers des réseaux téléphoniques pour glisser le bulletin dans l’urne en faveur de OUI. Souvent, trois fois par jour.
La Ligue Maliennes des Imams et Érudits au Mali (LIMAMA), la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS) et l’Appel du 20 février pour sauver le Mali, ont procédé à une campagne contre OUI.
Le 08 juin 2023, les soutiens du courant OUI ont décidé de sortir les muscles, à quelques jours du vote des Forces Armées Maliennes, en organisant un grand meeting. Mais, la mobilisation fut un échec, car le stade n’était que partiellement rempli.
Le 11 juin 2023, les militaires ont donné le ton en votant par anticipation comme annoncer dans le communiqué du gouvernement. Mais avant l’accomplissement de ce devoir civique des militaires, les citoyens se sont exprimés sur la question à travers des avis partagés.
Le 12 juin 2023, le Mouvement de Soutien à la Ligue Malienne des Imams et Érudits pour la Solidarité Islamique (LIMAMA) contre la laïcité, a lancé un appel de mobilisation aux Maliens de l’intérieur et de la Diaspora. L’objectif était de convier les uns et les autres à un meeting grandiose que le Mouvement organise le vendredi 16 juin afin d’exhorter les populations maliennes à voter en faveur du « NON » lors du Référendum constitutionnel prévu le dimanche18 juin.
Le 16 juin 2023, les deux courants OUI et NON s’étaient rendus respectivement au Stage du 26 mars et au Palais de la Culture dans le cadre de la clôture des campagnes référendaires.
Le 18 juin 2023, les Maliens de l’intérieur et hors du pays se sont rendus aux urnes pour glisser le bulletin en faveur du OUI ou du NON.
Le 19 juin 2023, la Mission d’Observation des Élections au Mali (MODELE-MALI) a rendu public son rapport sur le déroulement du scrutin référendaire. Dans ce rapport, il ressort qu’il n’y a pas eu d’élections à Kidal.
« Porté plainte contre »
Le 21 juin 2023, le président de l’Autorité Indépendante de Gestion des Élections, Moustapha Cissé a indiqué qu’à ce stade de la centralisation des résultats de l’intérieur et de l’étranger, le taux de participation est de 38%. Il a également affirmé que les résultats provisoires définitifs seront communiqués conformément au délai fixé par la loi électorale sur cinq jours à compter de la tenue du scrutin référendaire. C’était dans la salle de presse du Centre International de Conférence de Bamako, CICB, au cours d’un point de presse.
Le 22 juin 2023, le Cadre Stratégique Permanent (CSP), réunissant ces groupes a, dans un communiqué posté sur les réseaux sociaux, que dans « la quasi-totalité des régions » du nord, « aucun vote ne s’est déroulé« , à l’exception des principales villes des régions de Gao, Tombouctou et Ménaka « où les urnes ont été bourrées sans retenue ».
Le 22 juin 2023, le Front Uni Pour la Victoire du OUI, a porté plainte contre, le président de la MODELE-MALI, le docteur Ibrahima Sangho au niveau du Tribunal de la commune 4 pour avoir fait un communiqué qui contredit celui de l’AIGE sur la tenue du scrutin à Kidal. Ledit Front a été débouté de sa demande par le tribunal saisi.
Le 23 juin 2023, l’AIGE a proclamé les résultats provisoires au CICB avant de transmettre sans délai ces résultats à la Cour constitutionnelle.
Le 21 juillet 2023, la Cour Constitutionnelle a proclamé les résultats définitifs.
Le 22 juillet 2023, le texte de la Constitution est promulgué par le président de la transition et inséré au journal officiel.
La promulgation est l’acte par lequel une loi définitivement adoptée par le parlement, ou approuvée par le peuple via un référendum devient exécutoire.
La Rédaction : Horontv.ml